Françoise Roques est bibliothécaire, directrice de la médiathèque et du service culturel d’un village de moins de trois mille habitants : Vert-le-Grand, en Essonne. Avec le soutien quasi inconditionnel du maire de la commune et de son adjointe à la culture, Françoise Roques a pu mettre en œuvre des actions d’envergure dont nombre de villes aimeraient s’enorgueillir. À savoir : résidences d’écrivain (dont j’ai été le premier bénéficiaire, Benoit Richter le second, dans le cadre des dispositifs d’aides à la création de la région Île-de-France), ateliers d’écriture, rencontres d’auteurs, lectures publiques, soirée contes, conférences, concerts, spectacles oulipiens, expositions textes-photos et arts plastiques…Certes, la commune a les moyens, mais sans la volonté de faire, sans l’exigence d’une vraie programmation culturelle qui vise à remplir les têtes autant que les salles, aucune de ces actions n’aurait pu être mise en œuvre.
Tous les auteurs (Françoise Ascal, Bruno Doucey, Marie-Hélène Lafon, Michel Séonnet, et une quinzaine d’autres), tous les artistes (Lionel Antoni – photographe, Dominique Masse – peintre, Laurence Samson-Hincapié – chef de chœur, Michel Ziegler – sculpteur, Thierry Machuel – compositeur, Jehanne Carillon – comédienne, et une vingtaine d’autres) disent volontiers combien ils ont été surpris par la chaleur de l’accueil et la qualité de la préparation à leur venue ; également par le rayonnement des actions grâce à une bonne communication au-delà de la seule commune de Vert-le-Grand, d’où la présence d’un public fidèle, en nombre inespéré, jusqu’à 80 personnes certains jours et l’obligation de pousser les murs, à tout le moins les rayonnages et autres mobiliers !
La démarche de Françoise Roques s’inscrit à contre-courant d’une tendance qui voudrait que l’on distraie et amuse le public au prétexte qu’il aime ça (surtout ne pas lui « prendre la tête », l’expression est horripilante mais tellement entendue !). Certes, mais il aime aussi, ce public, qu’on le nourrisse, le surprenne, lui fasse découvrir des œuvres et entendre de nouvelles voix. Pour preuve, il est là, il revient, il en redemande !
Ces quelque trente dernières années, je suis intervenu dans bon nombre de médiathèques, en qualité d’auteur, de modérateur de rencontres littéraires ou d’animateur d’ateliers d’écriture, et je peux dire que la préparation de ces actions pêchait souvent par manque d’exigence, or c’est précisément cette exigence qui donne sens à ce type d’interventions. Pourquoi et pour qui on fait ce qu’on fait ? Dans quel ensemble cohérent d’actions s’inscrit telle rencontre, telle exposition, tel atelier ? En bref, une programmation culturelle ne relève pas d’une accumulation d’actions et d’événements, mais bien d’une construction pensée en amont et élaborée avec exigence et discernement. J’en ai acquis la conviction en œuvrant aux côtés de Françoise Roques pendant mon année de résidence à la médiathèque de Vert-le-Grand. C’est pourquoi j’ai tenu à la citer au nombre des partenaires qui ont compté dans ma carrière d’écrivain et m’ont fait progresser en tant qu’acteur culturel.